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Avril 2002 :
 la victoire de la dernière  chance

 


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Patrick Dils raconte ses difficultés d'enfant et son viol en prison...

Affaire Dils : Heaulme suspect numéro 1... 

L'avocat général requiert "le bénéfice du doute"







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Patrick Dils
lors de son dernier procès, 
avril 2002.

 

8 avril - 24 avril 2002 

C'est du 8 au 24 avril que Patrick Dils a été  rejugé pour la troisième et dernière fois. Le procès, public pour la première fois,  a eu lieu à Lyon. 

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Le dernier acte

Patrick Dils, rejugé pour les meurtres de deux enfants, a de nouveau clamé son innocence mercredi 10 avril 2002 devant la cour d'assises de Lyon mais n'a pas levé toutes les interrogations sur ses aveux de 1987.

Il a expliqué que les policiers lui avaient "suggéré" ces aveux mais a eu du mal à préciser pourquoi il les avait ensuite réitérés devant le juge d'instruction et d'autres personnes. "Si je suis ici, ce n'est pas par plaisir mais par nécessité, parce que je suis innocent. Vous avez aujourd'hui un homme devant vous mais ce n'est qu'une enveloppe. J'ai gardé mon cœur, mes yeux et mes paroles d'enfant. J'ai arrêté de vivre à seize ans", a dit l'accusé à la cour.

En prison depuis quinze ans, Patrick Dils, 31 ans, a été condamné à perpétuité en 1989 pour ces faits, puis à 25 ans de réclusion en juin 2001 lors d'un procès en révision à Reims. Il est jugé en appel pour la dernière fois.

Francis Heaulme était bien sur les lieux du crime à l'heure du meurtre
A la suite des dépositions, il est désormais certain que le tueur en série Francis Heaulme se trouvait à Montigny-lès-Metz (Moselle), le "visage en sang", non loin de l'endroit du meurtre des deux enfants, le soir du 28 septembre 1986 :
les deux pêcheurs, qui ne s'étaient manifestés qu'après le procès de Reims en juin 2001, ont raconté comment ils avaient découvert Francis Heaulme, le "simplet du village", "affolé, tremblant, le visage en sang", le soir du 28 septembre 1986, non loin de l'endroit où Alexandre Beckrich et Cyril Beining allaient être retrouvés, le crâne fracassé.

Alors qu'ils le reconduisaient chez sa grand-mère, Francis Heaulme leur aurait expliqué "être tombé dans les cailloux, dans la descente du chemin de fer", ce qui leur a paru "bizarre", car il "n'avait pas de blessures aux mains".

Entendu comme témoin, bien que la présomption de sa culpabilité se soit renforcée depuis sa première audition à Reims, Francis Heaulme a confirmé avoir rencontré les pêcheurs, ainsi qu'une "dizaine de gamins qui lançaient des cailloux", alors qu'il passait à vélo.

Toutefois, lors de son audition comme témoin, Francis Heaulme a certes reconnu avoir vu les enfants qui lui jetaient des cailloux, mais il a réaffirmé qu'il n'"avait pas tué" Alexandre Beckrich et Cyril Beining. Francis Heaulme, dont l'âge mental a été évalué à huit ans, a déclaré pour se disculper que ce n'était "pas son style" de prendre des pierres pour tuer, ayant plutôt "l'habitude" d'utiliser un opinel ou "d'étrangler"...

Une reconstitution faussée
Un ancien policier appelé comme témoin au procès de Patrick Dils a affirmé devant la cour d'assises des mineurs du Rhône que la reconstitution du double meurtre de Montigny-lès-Metz (Moselle) avait été faussée.

Omer Stragier a participé le 7 mai 1987 à la reconstitution des meurtres d'Alexandre Beckrich et de Cyril Beining, tous deux âgés de huit ans, conduite par l'ex-inspecteur divisionnaire Bernard Varlet et la juge Mireille Maubert.

A la barre, au cinquième jour du procès, il raconte comment Patrick Dils, alors âgé de 16 ans, était "fermement tenu par le bras par l'inspecteur Varlet qui voulait absolument le rendre docile". Il dit également avoir été frappé par les remarques du brigadier Roland Hupp, qui participait également à la reconstitution. Ce brigadier avait participé aux premières constatations sur les lieux du crime, au soir du 28 septembre 1986. Selon Omer Stragier, ce brigadier aurait dit: "Mais c'est pas là que ça s'est passé, c'était là-bas" tandis que Patrick Dils se dirigeait vers le lieu présumé du crime. "C'était pas comme ça, ils lui font faire n'importe quoi, ce n'était pas ça du tout", aurait poursuivi Roland Hupp. "On a ensuite demandé à Dils de 'refaire le geste'. Et comme un élève ne sachant pas sa leçon, il n'a pas voulu faire le geste", poursuit Omer Stragier. "Puis il a accepté de s'agenouiller et, regardant désespérément autour de lui, il a pris une pierre posée à côté de lui et asséné trois coups au mannequin."

"Le brigadier a alors repris : 'C'est n'importe quoi ça, maintenant ça suffit'", ajoute Omer Stragier.

"Une question de conscience"

Le policier dit à la barre avoir "d'autres faits troublants" à rapporter. "Il y avait quatre dames à proximité de la reconstitution, ce n'était pas des mégères. L'une d'elle a dit en apercevant Patrick Dils : 'Alors, commandant, ce n'est pas le vieux monsieur qu'on a vu à vélo qui est accusé?'". A ce stade de la reconstitution, Omer Stragier dit avoir été "très étonné".

Ces femmes ont dit avoir confié ce détail à la police mais ont ajouté que leur déclaration n'avait pas été enregistrée. Le vieux monsieur en vélo sera identifié par la suite comme pouvant être le tueur en série Francis Heaume, effectivement présent et à vélo dans la ville le jour du drame.

Le policier en retraite mime toutes ces scènes devant la cour d'assises des mineurs du Rhône qui rejuge Patrick Dils : "Je me le rappelle comme si c'était hier. Pour moi, c'est une question de conscience de venir témoigner. C'est sa dernière chance. Il ne s'est jamais défendu. Mais comment aurait-il pu le faire ?"

Plaidoiries

Soulignant que "tout lui paraissait douteux" dans ce dossier, en dépit des "aveux immondes, dévastateurs" et pleins d'incohérences, sur lesquels Dils était revenu, l'avocat général n'avait réclamé mardi ni peine, ni condamnation, mais s'était gardé de prononcer le mot d'"acquittement".

"Peu importe les conséquences, si vous avez l'intime conviction que Dils est innocent, vous devez prononcer son acquittement", a plaidé Me Jean-Marc Florand, avant que la cour ne se retire pour délibérer. "Ne vous demandez pas les conséquences pour la justice et l'institution, ne pensez pas à la peine des familles et ne tombez pas dans une peine de complaisance", a-t-il dit.
"Je vous demande de lui rendre son innocence, son honneur, sa liberté et son sourire", a déclaré Me Florand, à l'issue d'une plaidoirie dans laquelle il a développé "les preuves de l'innocence de Dils et de la culpabilité de Heaulme".
"On a construit un coupable idéal et docile à défaut d'un vrai coupable, on a fabriqué des aveux", a souligné le défenseur, décrivant l'accusé comme un "robot mécanique, écrasé par les événements exceptionnels qu'il était en train de vivre".
"Oui, Dils est coupable d'avoir avoué un crime qu'il n'a pas commis, qu'il n'a pu commettre, mais il n'avait que 16 ans", a souligné Me Florand, ajoutant que si il "s'est rendu coupable de ne pas avoir hurlé son innocence", c'est parce qu'il n'est "pas un rebelle".
"Le spectre de Francis Heaulme est l'élément capital du dossier", a insisté l'avocat car "c'est lui qui permet d'éliminer la culpabilité de Dils". "Nous avons la certitude objective absolue de sa participation dans ce carnage".

"Quelle est la probabilité statistique que Heaulme qui a vu les enfants, qui avait un mobile suffisant pour les tuer, ne soit pas l'auteur des meurtres qui portent sa +signature criminelle+", a-t-il demandé.
"Mais peut-on reprocher à Heaulme de ne pas avoir avoué les crimes de Montigny?", s'est interrogé l'avocat. "Il sait qu'alors sa soeur ne viendra plus jamais le voir en prison et il perdrait le peu de contact qui lui reste avec l'humanité".

Dans la matinée du 23 avril, l'autre défenseur de Dils, Me Bertrand Becker, avait expliqué les "raisons de l'erreur judiciaire" que la cour "a le devoir de réparer".
"Vous prononcerez l'innocence de Patrick pour chasser la justice bâclée", a-t-il dit, expliquant comment comment la "quête d'un coupable pour un crime qui ne peut rester impuni" avait fait que l'"enquête policière se transforme en chasse à l'homme".
"Au lieu d'un tueur fou, on va pourchasser un adolescent timide et anormalement normal", a-t-il dit, dénonçant les "incohérences, les invraisemblances, les oublis" de l'enquête.
Prenant la parole en dernier, Patrick Dils a déclaré à l'adresse des familles des victimes : "Je suis innocent. Je n'ai pas tué vos enfants. Mon souhait le plus cher c'est à mon tour d'avoir des enfants. Encore aujourd'hui j'ai de la haine pour personne".


Le verdict

Patrick Dils a été définitivement acquitté mercredi 24 avril 2002 par la cour d'assises des mineurs du Rhône.
A une semaine près, Patrick Dils, âgé de 31 ans, en aura passé quinze en détention pour un crime qu'il avait reconnu avant de se déclarer innocent.
A 22H10, il a franchi en homme libre, encadré de ses avocats, les portes de la prison Saint-Paul de Lyon où l'attendait une horde de journalistes, fermement maintenus à bonne distance par un imposant cordon de CRS.
"Je suis extrêmement content de la décision qui vient d'être rendue mais il va falloir du temps pour analyser la situation. Quoi qu'on puisse faire, personne ne pourra me rendre ces 15 ans", a déclaré Patrick Dils. "Je veux retrouver ma famille, mes amis et puis souffler, parce que je suis fatigué, je suis usé, j'ai envie de me reposer", a-t-il dit lors d'une très brève prise de parole avant de monter dans un véhicule d'une chaîne de télévision privée.
A l'énoncé du verdict, il a éclaté en sanglots avant de tomber dans les bras de son avocat. Son père, Jean Dils, a été victime d'un léger malaise mais a vite retrouvé ses esprits.»

© AFP

"Ce dernier procès n'a pas été une victoire mais un dû",
 
Patrick Dils, novembre 2002

 

 


© Elise Delprat

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